EUROPE ET CLIMAT…
Posté par pcfmaubeuge le 27 avril 2013
DANS LA PRESSE
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L’EUROPE ET LE CLIMAT : UN MYTHE S’EFFONDRE
Par FRANCIS WURTZ
Député honoraire du Parlement européen
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On savait déjà que le « marché libre et non faussé », qui est au cœur de la vision libérale de la construction européenne , était incompatible avec une ambition sociale digne de ce nom. Il est désormais établi que cette conception marchande et financière de « l’Europe » est tout aussi antinomique d’un grand dessein écologique : en l’occurrence , la lutte contre le réchauffement climatique . La majorité du Parlement européen vient, en effet, le 16 avril dernier, d’asséner lui-même le coup de grâce au mythe du « marché du carbone », qui était la pièce maîtresse de la conception capitaliste de l’action pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre.
Revenons huit ans en arrière. En 2005, la Commission européenne institue un système censé pousser -grâce aux mécanismes du marché- les entreprises à réaliser des investissements permettant de réduire sensiblement les émissions de CO2. La méthode choisie pouvait paraître imparable : 12000 entreprises concernées recevraient, chaque année, gratuitement,une quantité donnée de « droits à polluer ». Si elles émettaient davantage de CO2, elles devraient acheter des droits supplémentaires sur le « marché des quotas d’émission « . En revanche, si, suite à des investissements appropriés, elles n’utilisaient pas tous les « droits à polluer » qui leur avaient été alloués, elles pourraient revendre ces quotas sur la marché créé à cet effet. « Le droit de polluer le climat a désormais un prix » soulignaient les défenseurs de ce mécanisme, convaincus d’avoir ainsi trouvé le moyen de mettre le « marché » au service d’une cause écologique. Bref, le recours au marché ferait de l’UE la championne de la lutte pour le climat.
Le bilan réel de ce processus est, hélas, tout autre. Gavées de permis gratuits d’émissions de CO2 , nombre de grandes entreprises, particulièrement polluantes, ont réussi à échapper aux mesures permettant de réduire leurs émissions sans avoir à acheter de droits à polluer. Résultat: faute de demande suffisante de quotas de CO2, leur prix s’est effondré sur le marché des droits à polluer. De 30€ la tonne en 2005, il est tombé à moins de 5€ en 2013! La récession économique conduisant en outre à une réduction spontanée des émissions de gaz à effet de serre, nombre d’industriels n’avaient plus aucune raison de se préoccuper d’investir dans la dépollution .
C’est dans ce contexte que la Commission européenne avait prévu de réduire temporairement la distribution gratuite des fameux droits à polluer. Ce faisant, elle espérait faire remonter le prix des quotas et, par là même, »rentabiliser » à nouveau les investissements écologiques . En vain. Sous la pression des plus gros pollueurs, et au nom de la nécessité de préserver leur « compétitivité », une majorité de parlementaires européens a poussé la logique de marché jusqu’au bout en rejetant cette mini-régulation d’urgence . Le prix de la tonne de CO2 glissa aussitôt à 3€ : c’est la fin du « marché du carbone européen ». Le défi, lui, reste entier: il est plus vital que jamais pour l’Europe de se libérer de sa dépendance des énergies fossiles et de s’engager dans la transformation des modes de production et de consommation générés par un système capitaliste aujourd’hui en crise profonde.
Développement social et transition écologique doivent décidément se conjuguer dans le combat pour changer l’Europe.
25 avril 2013
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